Brice Levy Koumba Lamby explore en profondeur le « problème des interdépendances » au sein des interactions collaboratives, en soulignant leur nature potentiellement problématique et la nécessité impérieuse de les gérer efficacement. L’auteur pose comme fondement que la collaboration est un système complexe de transactions intrinsèquement interconnectées, ce qui engendre une incertitude fondamentale due à la nature variée et à l’influence mutuelle des éléments constitutifs des interactions (physiologiques, physiques, linguistiques, environnementaux, technologiques et sociaux). Cette complexité est accrue par l’interaction constante du système collaboratif avec d’autres systèmes extérieurs.
Pour appréhender cette complexité, Brice Levy Koumba Lamby s’appuie sur les concepts de « mise en réseau » et de « réticulation sociale » (Rosnay), mettant en lumière la coévolution et la complexification des systèmes interconnectés. L’« interconnectivité » est définie comme la prise en compte de ces interdépendances et nécessite une approche globale et complexe (Morin). L’auteur convoque également la notion de « déterminisme global » (Matisse) pour analyser les phénomènes entrelacés et leurs causalités multiples. La recherche se focalise sur l’étude de l’interconnectivité afin de comprendre et de gérer les « perturbations en cascade » (Zimmerman) qui découlent des failles au sein de ces systèmes interconnectés. La question de recherche centrale est formulée ainsi : « De quoi est fonction le développement de l’interaction et de la collaboration ? ». L’hypothèse principale avancée est que la collaboration est intrinsèquement liée à l’interaction, et que l’interconnectivité constitue le cœur même de la collaboration. L’efficacité de la collaboration dépendrait donc de la synchronisation des opérations pour prévenir les réactions en chaîne néfastes.
Sur le plan méthodologique, Brice Levy Koumba Lamby articule sa recherche autour de deux axes principaux : une « Approche systémique » et un « Modèle anthropologique ». L’« Approche systémique », inspirée de Joël de Rosnay, est présentée comme une démarche transdisciplinaire essentielle pour appréhender la complexité organisée, les interactions et les interdépendances. Elle se révèle particulièrement pertinente pour étudier l’interconnectivité, les réactions en chaîne et la synchronisation dans le contexte des collaborations à distance. Brice Levy Koumba Lamby insiste sur la conception du système ouvert, caractérisé par une variété d’éléments spécialisés, organisés hiérarchiquement et intensément interconnectés. Cette approche privilégie l’analyse des processus temporels (aspect fonctionnel) par rapport à l’organisation spatiale (aspect structurel), et prône l’utilisation de la simulation et de l’observation des comportements pour établir des règles d’action et faciliter la prise de décision. Les caractéristiques fondamentales de l’approche systémique sont : la focalisation sur les interactions, une vision globale, la prise en compte de la dimension temporelle, la validation par confrontation avec la réalité, et l’utilisation de modèles flexibles adaptés à la décision et à l’action. Les outils méthodologiques principaux sont l’analyse des systèmes, la modélisation et la simulation.
En complément de l’approche systémique, l’article introduit un « Modèle anthropologique » inspiré des travaux de Marcel Mauss et de son concept de « système des prestations totales ». Cette méthode comparative, issue de l’« Essai sur les dons », vise à comprendre la nature des échanges au sein de différentes sociétés, notamment archaïques, en étudiant les « prestations totales » en tant que phénomènes sociaux totaux. Ces prestations, bien que d’apparence volontaires et gratuites, sont en réalité obligatoires et intéressées, reposant sur les obligations de donner, recevoir et rendre. L’article met en évidence l’approche holistique de l’anthropologie, telle qu’interprétée par Lévi-Strauss, qui appréhende le « fait social total » en intégrant ses dimensions physiques, physiologiques, psychiques et sociologiques. Cette approche souligne l’importance d’une compréhension globale et interconnectée des faits sociaux, en privilégiant les relations et les fonctions par rapport aux aspects purement qualitatifs, à l’image du langage considéré comme un système de relations et de communication.
Par ailleurs, Brice Levy Koumba Lamby identifie diverses causes potentielles de défaillance de la collaboration mises en évidence par différents chercheurs. Ces causes incluent : l’engagement irrévocable ou le refus d’adaptation (Moessinger), les problèmes liés à la « face » (Goffman), le déficit de présence socio-affective (Jézégou), la rigidité (Dessus et Marquet), le refus de transactions (Mauss), les solutions problématiques elles-mêmes (« effet système » et « effet contre-intuitif » de Crozier et Friedberg), les failles des outils informatiques (Vial), et enfin, l’interconnectivité elle-même (Zimmerman) qui peut amplifier les erreurs et les perturbations.
Face à ces défis, Brice Levy Koumba Lamby propose des pistes pour la gestion des interactions en milieu collaboratif. Ces solutions comprennent la synchronisation des actions, l’anticipation des effets de l’interconnectivité par la redondance (solutions alternatives pour pallier les défaillances), et le développement d’une connaissance approfondie des systèmes utilisés. L’interconnectivité est présentée comme un problème d’intérêt général et d’ingénierie territoriale, soulignant la nécessité de gérer l’incertitude liée aux interdépendances pour assurer une collaboration efficace. En conclusion, la gestion des interactions est assimilée à une gestion de l’interconnectivité, et l’étude du langage est proposée comme un modèle pertinent pour comprendre et appréhender les mécanismes de l’interconnectivité, partant du principe que l’univers pourrait être structuré comme un langage.
Collaboration et formation à distance est le livre cité en code binaire dans le roman Factice.
